22 juin 2025 : journée inaugurale de la ligne Montréjeau-Gourdan-Polignan / Luchon. Un peu plus de dix ans après sa fermeture, le train fait son grand retour sur la ligne nouvelle. C’est l’évènement régional au large écho national se propageant du fond des vallées du Haut-Comminges et de la Barousse !
En ce dimanche matin Jean-François, Marc et Philippe, tous trois co-présidents de l’association CDRIC, covoiturent de Luchon en direction de la gare de Montréjeau-Gourdan-Polignan. Vers 9h35 ils se présentent à l’accueil des invités de la Présidente de Région, Carole Delga, un petit privilège qui leur confère pour quelques heures le statut « d’officiels ». Ils sont aussi accompagnés de nombreux adhérents de l’association qui bénéficient de ce trajet inaugural avec réservation.
Les Chanteurs montagnards de Bagnères de Bigorre et les Troubadours du Mont-Royal animent le temps d’accueil. Des boissons chaudes et des viennoiseries préparées et offertes par le CFA du Comminges permettent un petit-déjeuner en plein-air sous un soleil déjà bien vivace.
Puis à 9h45 précises, Carole Delga, accompagnée du député Joël Aviragnet et de nombreux journalistes, descend du train en provenance de Toulouse. Après avoir salué les élus présents et les sympathisants venus pour l’occasion, un temps court est dédié aux prises de parole avant le départ de la rame pour Luchon à 10h15.
Le maire de Gourdan-Polignan, Patrick Saulneron, fait un premier discours. Il fait un rappel historique du chemin de fer avec son initiateur Louis Napoléon Bonaparte au XIXe siècle. « Voies ferrées, gares, compagnies publiques, il a mis le progrès social sur les rails, au sens propre du terme. C’est en 1873, tel un serpent de fumée noire, que le train arrive à Luchon. Une révolution à vapeur, certes, mais une révolution quand même (…) Et un jour de novembre 2014, dans une indifférence presque pudique, la ligne s’est tue. Et il fallait bien une poignée de passionnés, de convaincus, d’élus un peu têtus, voire carrément obstinés, pour ne pas lâcher l’affaire (…) Ce n’est pas une ligne fantôme qu’on rouvre, c’est une ligne de vie. Une ligne d’espoir, une ligne de bon sens (…) Alors oui, cette ligne, c’est aussi un pari économique. Elle soutiendra les territoires, elle attirera les touristes, elle facilitera les trajets domicile-travail (…) Bonne route à la ligne Montréjeau/Gourdan-Polignan-Luchon, et à tous ceux qui la feront vivre au quotidien. »
« Une porte que la Présidente a voulue, s’ouvre sur la montagne », souligne Michel Capomasi, adjoint à la mairie de Montréjeau, représentant Eric Miquel.
La Présidente conclue en déclarant : « Il faut avoir des objectifs justes (…) Oui, on peut rouvrir des lignes dans ce pays. Nous avons des solutions ».
L’heure du grand départ arrive et l’ensemble des premiers usagers se dirigent vers le quai. Jean-François, Marc et Philippe sont dirigés en tête de train accompagnés entre autre, du directeur général délégué aux Transports à la Région, élus régionaux, responsables des entreprises NGE et TSO, la directrice territoriale SNCF Réseau Occitanie.
La première annonce de départ retentit dans le wagon. Les portes se ferment. L’émotion est bien là. Le mouvement de la rame avertit du démarrage. C’est parti ! Un silence règne un instant dans le wagon, chacun les yeux rivés sur les fenêtres, regardant défiler le paysage que le trajet en voiture vous interdit d’observer. C’est aussi çà le plaisir du train.
Ce matin là les vaches ne sont pas au rendez-vous mais bientôt elles redécouvriront étonnées ce nouveau « serpent rouge » courir à travers la campagne et grimper vers Luchon.
Puis les sourires et les regards de chacun marquent la joie de cette renaissance ferroviaire avec le sentiment du devoir accompli. Les échanges et les conversations permettent alors de parler de l’avenir de la ligne, des prochaines échéances et des nouvelles étapes à concrétiser.
De nombreuses personnes sont au rendez-vous tout au long du trajet, saluant, filmant, photographiant, témoignant ainsi d’un intérêt pour le retour du train.
10h37 : premier arrêt à Loures-Barousse-Barbazan avec un accueil en musique en présence du maire Jean Michel Palao. Carole Delga fait un discours qu’elle reproduira aux haltes suivantes.
11h03 : deuxième arrêt à Saléchan-Siradan avec accueil du maire Paul Loustau.
11h28 : troisième arrêt à Marignac-StBéat avec accueil, en musique, du maire André Campagne avec écharpe brodée, s’il-vous-plait !
Et la dernière étape du trajet commence. La montée vers Luchon, sur un tracé sinueux longeant le cours de la Pique, révélant des éléments du paysage oubliés depuis la route, route tellement empruntée pendant ces dix années d’attente et d’espérance.
Cette montée permet d’observer l’ampleur du chantier réalisé sur les ouvrages d’art, les soutènements des rives de la rivière et la sécurisation des parois rocheuses, si proches des trains en certains endroits.
Abordant le PN37 à l’entrée du village d’Antignac où de nombreuses personnes sont encore rassemblées, on entame la dernière ligne droite menant à Luchon, là où la vue s’ouvre largement sur le fond de la vallée qui permet d’apercevoir le pic de Sacroux (le Sacroutche comme on dit par ici) et le pic de Sauvegarde qui toise la ville de Luchon, toujours penché, qui aujourd’hui profite de cette particularité pour mieux observer l’animation dans la ville.
Après le dernier pont de Juzet, plus que 400 mètres avant le terminus. La foule est importante, massée aux abords de la ligne pour mieux prendre des clichés ou vidéos. Le début du quai arrive et la foule se densifie. Tout le monde se salue avant la descente.
11h37. Immobilisation du train : « Vous êtes arrivés en gare de Luchon » !
Les portes s’ouvrent et l’expression « prendre un bain de foule » prend tout son sens aujourd’hui. L’affluence est énorme sur les quais, dans le hall voyageur, sur le parvis de la gare. Carole Delga, au milieu de cette affluence, est reçue par le maire de Luchon, Eric Azemar, dont l’arrière-grand-oncle inaugurait déjà le 17 juin 1873 cette ligne historique. Une histoire de famille !
La présidente parvient au milieu de la foule à répondre aux nombreux journalistes et aux sollicitations. Une photo générale immortalise l’instant à l’avant du train et la présidente entourée de tous les élus coupe le ruban inaugural.
Un long cortège se dirige alors sur le parvis de la gare dans une « haie d’honneur » formée par le Quadrille luchonnais et les Fils de Luchon en habits traditionnels. Certainement plus de mille personnes sont au rendez-vous.
Une fois encore, Carole Delga renouvelle l’exercice du discours avec cette fois des remerciements appuyés à toutes celles et ceux qui ont contribué à cette réussite collective : les services de la Région, les élus locaux, les entreprises NGE, TSO, entreprises locales et régionales qui avec environ 400 salariés sur les différents chantiers pendant 10 mois ont contribué à soutenir les services et commerces locaux, SNCF Voyageurs et SNCF Réseau qui reste l’opérateur en service sur la ligne, mais aussi les associatifs et les soutiens de la population.
Les animations des Guides à cheval, Fanfare luchonnaise, chorales, accompagnent un temps de dégustation de produits régionaux avant la grande remontée vers l’Allée d’Etigny spécialement aménagée pour se poser et se restaurer. Sous 32°C !
L’après-midi débute devant nos assiettes de menus composés par les restaurateurs, accompagné des animations de rue.
Puis un orage s’invite à la fête obligeant à un repli rapide pour se protéger de la pluie qui permet quand même de se rafraîchir.
Enfin vers 16h30, devant les Thermes, l’après-midi se clôture par un concert exceptionnel, celui du compositeur de jazz, André Manoukian, accompagné de son percussionniste Mosin Kawa. Un grand moment musical et de pédagogie sur les influences mutuelles des musiques, leurs origines et leurs résonances contemporaines.
Le Sauvegarde, penché entre la France et l’Espagne, aura été témoin dans un lointain passé du passage de cette culture musicale orientale vers notre contrée pyrénéenne influençant nos troubadours de langue d’Oc.
Une très belle journée s’achève, une belle fête collective, un grand moment d’émotion gravé dans la mémoire de Jean-François, Marc et Philippe et de tous les adhérents de la CDRIC, au Panthéon de leurs souvenirs.
19h36. De la rue Clément Ader on étire l’instant présent en arrêtant notre regard sur le train du dernier retour vers Montréjeau/Gourdan-Polignan, prêt à démarrer dans sa belle livrée rouge. On peut aimer le train pour son utilité mais aussi pour son esthétique.
Mais si on l’aime c’est surtout parce qu’il suit un chemin de fer !